La version 2.6 du noyau linux a introduit le concept d’initramfs, une amélioration de l’initrd déjà présent dans les versions prédédentes. Il permet une souplesse exceptionnelle dans le processus de démarrage d’un système Linux. Malheureusement la documentation est rare sur la façon de le créer.
Qu’est-ce qu’un initramfs ?
Dans le processus de démarrage d’un système Linux, tout commence par le chargement du noyau. Après s’être initialisé, celui-ci monte le système de fichiers racine (/), puis exécute le programme /sbin/init qui prend en charge la suite des opérations : initialisation du hostname, des interfaces réseau, lancement des divers services, etc…
Cela suppose toutefois qu’à l’issue de l’initialisation du noyau, le système de fichiers racine est disponible pour être monté. C’est généralement le cas, car ce système de fichiers se trouve la plupart du temps sur une partition du disque dur local, et le noyau possède toutes les informations pour le monter : pilote de disque dur, pilote IDE, pilote système de fichiers (ext2 par exemple). Mais il existe des situations où une préparation supplémentaire est nécessaire avant que le système de fichiers racine soit accessible.
- / est un partage NFS, auquel cas il faut auparavant initialiser l’interface réseau
- / se trouve sur un volume logique LVM, qui ne sera visible qu’après avoir exécuté un vgscan
- dans le cas d’un noyau complètement modulaire, les pilotes nécessaires pour monter / ne sont pas intégrés au noyau, il faut donc les insérer avant de procéder au montage
Dans tous ces cas de figure, on se trouve dans une situation où les outils nécessaires pour monter un système de fichiers se trouvent sur ce même système de fichiers. Impasse ? Non. C’est précisément à cela que sert l’initramfs !
L’initramfs est donc ceci : un mini système de fichiers, contenant tous les outils nécessaires au montage du véritable système racine. Également connu sous le nom « early userspace », il existe depuis la version 2.6 de Linux. Il remplace un mécanisme similaire nommé initrd qui existait dans les versions 2.4. initrd est toujours supporté par les noyaux 2.6, mais il est destiné à être progressivement remplacé par initramfs.
Configuration du noyau
Voici les options qui doivent impérativement être sélectionnées lors de la configuration du noyau pour que celui-ci puisse faire usage de l’initramfs :
Section Device drivers/Block devices: <*> RAM disk support (4096) Default RAM disk size (kbytes) [*] Initial RAM disk (initrd) support Section File systems/Pseudo filesystems: [*] /proc file system support [*] Virtual memory file system support (former shm fs)
Création de l’initramfs
Répertoire de travail
Commençons par créer un répertoire dans lequel nous construirons l’arborescence de notre initramfs. Celle-ci comprendra les répertoires habituels, ainsi que les devices indispensables dans /dev.
mkdir rootfs cd rootfs mkdir bin mkdir lib mkdir etc mkdir proc mkdir sys ln -s bin sbin mkdir dev cd dev mknod console c 5 1 mknod null c 1 3 mknod systty c 4 0 mknod tty1 c 4 1 mknod tty2 c 4 2 mknod tty3 c 4 3 mknod tty4 c 4 4 mknod ram b 1 1
Le script init
Une fois l’initramfs monté en tant que système de fichiers racine, le noyau exécute le programme init situé à la racine du système de fichiers. Dans notre exemple, il s’agira d’un script shell chargé de préparer le véritable /, situé sur un volume LVM.
#!/bin/sh echo Loading Device Mapper insmod /lib/dm-mod.ko echo Mounting /proc mount -n -t proc proc /proc echo Mounting /sys mount -n -t sysfs sysfs /sys echo Starting udev udevstart echo Unmounting /sys umount /sys echo Detecting LVM volumes vgscan echo Activating LVM volumes vgchange -a y ROOT=$(cat /proc/cmdline | tr ' ' 'n' | grep ^root= | cut -d= -f2) echo Command line root is $ROOT echo Mounting real root filesystem mount -n -o ro $ROOT /mnt echo Unmounting /proc umount /proc echo Running init exec bin/run-init /mnt /sbin/init $*
Dans un premier temps, le script charge les modules dont il a besoin. Si tous les pilotes nécessaires ont été compilés dans le noyau, cette étape est naturellement inutile.
Puis il monte les pseudo systèmes de fichiers /proc et /sys, qui seront nécessaires au fonctionnement des programmes lancés par la suite.
L’appel à udevstart permet de remplir /dev avec les devices connus par le noyau. Une alternative consisterait à remplir statiquement /dev, mais cela oblige à être exhaustif et à inclure nombre de devices parfaitement inutiles. Dans le cas de LVM, il deviendrait de plus impossible de changer le nom du volume racine, car l’initramfs ne contiendrait pas le device correspondant. L’un dans l’autre, l’approche udev est à la fois plus souple et plus élégante !
vgscan et vgchange permettent de détecter les volumes LVM et de les activer. Les devices correspondants sont automatiquement ajoutés à /dev.
L’étape suivante consiste à rechercher dans les paramètres passés au noyau, un paramètre de la forme root=device
qui donnera le nom du device sur lequel se trouve le véritable système de fichiers racine. On monte alors ce device sur /mnt.
Le script exécute ensuite le programme run-init, qui va remplacer l’initramfs par le système de fichiers monté sur /mnt en tant que racine, libérer les ressources utilisées par l’initramfs, et appeler le véritable /sbin/init avec les paramètres qu’init a reçu du bootloader.
Notons au passage les programmes auxquels fait appel init, et qu’il faudra inclure dans l’initramfs avec leurs dépendances :
- Un shell !
- echo, insmod, mount, umount, cat, grep, cut, tr
- udevstart
- vgscan, vgchange
- run-init
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